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Poèmes en français


Ah! Vous êtes mes soeurs, les âmes qui vivez

Ah! Vous êtes mes soeurs, les âmes qui vivez
Dans ce doux nonchaloir des rêves mi-rêvés
Parmi l’isolement léthargique des villes
Qui somnolent au long des rivières débiles ;

Ames dont le silence est une piété,
Ames à qui le bruit fait mal ; dont l’amour n’aime
Que ce qui pouvait être et n’aura pas été ;
Mystiques réfectés d’hostie et de saint chrême ;

Solitaires de qui la jeunesse rêva
Un départ fabuleux vers quelque ville immense,
Dont le songe à présent sur l’eau pâle s’en va,
L’eau pâle qui s’allonge en chemins de silence…

Et vous êtes mes soeurs, âmes des bons reclus
Et novices du ciel chez les visitandines,
Ames comme des fleurs et comme des sourdines
Autour de qui vont s’enroulant les angélus

Comme autour des rouets la douceur de la laine!
Et vous aussi, mes soeurs, vous qui n’êtes en peine
Que d’un long chapelet bénit à dépêcher
En un doux béguinage à l’ombre d’un clocher,

Oh! Vous, mes soeurs, – car c’est ce cher nom que l’église
M’enseigne à vous donner, soeurs pleines de douceurs,
Dans ce halo de linge où le front s’angélise,

Oh! Vous qui m’êtes plus que pour d’autres des soeurs
Chastes dans votre robe à plis qui se balance,
Ô vous mes soeurs en notre mère, le silence!


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Poeme Ah! Vous êtes mes soeurs, les âmes qui vivez - Georges Rodenbach