Stances
Un amant qui poursuit les beaux yeux d’une dame,
Et qui les a choisis pour miroir de son âme,
Qui trompe son esprit aux rais de tel flambeau,
S’encourt hâtivement à son heure dernière,
Comme celui qui suit d’un ardant la lumière
Qui le conduit au fleuve où il fait son tombeau.
Il peint dedans la nue, il bâtit sur l’arène,
Il fonde sur les flots son espérance vaine,
Et prépare le feu pour se sacrifier,
Il contraint son humeur, il se change et rechange,
D’un esprit infernal il pense faire un ange,
Et croit en l’adorant de se déifier.
Il fait son paradis d’un enfer de misère,
Il conte à des rochers son tourment ordinaire,
D’un enfant nu et pauvre il espère son bien :
Il se tend des filets pour se prendre soi-même,
Et s’il tient une fois ce bien que plus il aime,
C’est un songe volant qui dure moins que rien.