Que n’ai-je comme Bacchus
Que n’ai-je comme Bacchus
Cette puissance divine!
Jaloux, vous seriez vaincus
Par une feuille de vigne.
Ma Rozette me tiendrait,
Mais tout en votre présence,
Et douce me baiserait.
Que n’ai-je cette puissance?
Je deviendrais beau raisin,
Elle, sans être aperçue,
Me mangerait grain à grain,
Devant sa mère déçue.
En raisin change-moi donc,
Ou en archet qui se plie.
Tel plaisir tu ne fis onc
A celui qui te supplie.
Fais-moi la puissance avoir
De ravir mon Érigone,
Pour mes jaloux décevoir.
Ce don-là, donne-moi, donne,
De grâce, donne-le-moi,
Ô Père dont l’abondance
Fait au poète et au roi,
Avoir la paix et science.
La même chose tu fis
Pour décevoir ta maîtresse :
Qu’ainsi donc je sois transmis,
Pour jouir de ma déesse.
Qu’est-ce que tu veux de moi
Pour guerdon de cette proie?
Tes liqueurs déjà je bois,
Tous les jours, à pleine tasse!
Change donc pour mes amours
Mon corps en belle vendange,
Avant cela, tous les jours,
Je chanterai ta louange
Ô quel heur ce me serait
De la tenir toute nue,
Quand elle m’écraserait
Devant sa mère déçue!
Ce beau pied je laverais,
Et sauterais à sa face,
Son beau sein je baiserais
Devant la jalouse race.
Que ne suis-je en beaux raisins,
En une profonde cuve,
Échangé en ces bons vins
Qui lui serviraient d’étuve!
Pour toujours être content,
Cette vendange passée,
Je voudrais être sarment
En une masse entassée.
Tous les matins, je ferais
Une ardente et belle flamme.
Las! comme je chaufferais
La chemise de Madame!