Lorsque ta main confie, un soir
Lorsque ta main confie, un soir des mois torpides,
Au cellier odorant les fruits de ton verger,
Il me semble te voir avec calme ranger
Nos anciens souvenirs parfumés et sapides.
Et le goût m’en revient tel qu’il passa jadis
Dans l’or et le soleil et le vent – sur mes lèvres ;
Et je revis alors mille instants abolis
Et leur joie et leur rire et leurs cris et leurs fièvres.
Le passé ressuscite avec un tel désir
D’être encor le présent et sa vie et sa force,
Que les feux mal éteints brûlent soudain mon torse,
Et que mon coeur exulte au point d’en défaillir.
O beaux fruits lumineux en ces ombres d’automne,
Joyaux tombés du collier lourd des étés roux,
Splendeurs illuminant nos heures monotones
Quel ample et rouge éveil vous suscitez en nous.