Les nénuphars
A la baronne H. de B.
Nénuphars blancs, ô lys des eaux limpides,
Neige montant du fond de leur azur,
Qui, sommeillant sur vos tiges humides,
Avez besoin, pour dormir, d’un lit pur ;
Fleurs de pudeur, oui! vous êtes trop fières
Pour vous laisser cueillir… et vivre après.
Nénuphars blanc, dormez sur vos rivières,
Je ne vous cueillerai jamais!
Nénuphars blancs, ô fleurs des eaux rêveuses,
Si vous rêvez, à quoi donc rêvez-vous?…
Car pour rêver il faut être amoureuses,
Il faut avoir le coeur pris… ou jaloux ;
Mais vous, ô fleurs que l’eau baigne et protège,
Pour vous, rêver… c’est aspirer le frais!
Nénuphars blancs, dormez dans votre neige!
Je ne vous cueillerai jamais!
Nénuphars blancs, fleurs des eaux engourdies
Dont la blancheur fait froid aux coeurs ardents,
Qui vous plongez dans vos eaux détiédies
Quand le soleil y luit, Nénuphars blancs!
Restez cachés aux anses des rivières,
Dans les brouillards, sous les saules épais…
Des fleurs de Dieu vous êtes les dernières!
Je ne vous cueillerai jamais!