La mort de Rollant
C’était orgueil de vivre en France-la-Louée,
Car Dieu l’avait élue et le monde avouée
Et, manifeste en tous ses gestes qu’il dictait,
Dieu s’exprimait par elle – et la Terre écoutait.
Les jeunes d’à présent, vous l’avez appauvrie
De gloires et d’honneur jusqu’à la ladrerie,
Si – qu’à vous observer – nous, les vieux, nous songeons :
La sève du vieux tronc se perd en sauvageons.
Karl, le grand Empereur, s’en revenait d’Espagne
Et, droit contre le ciel, en haut de la montagne,
Son beau neveu Rollant planta son pavillon.
L’aube crève : – les preux s’assemblent : Gannelon
Dit au grand Karl : » Rollant, mon beau fils, est un homme
Des plus fameux parmi tous ceux que l’on renomme
Si nous voulons rentrer, sans être talonnés
Par ces nègres païens, vrais diables incarnés,
À qui pouvons-nous mieux fier l’arrière-garde
Qu’à Rollant? «