Paul au tombeau de Virginie
Repose en paix, ma Virginie!
Le repos n’est pas fait pour moi.
Hélas! le monde entier, sans toi,
N’a rien qui m’attache à la vie.
Le plaisir ainsi que la peine,
Tout passe avec rapidité ;
Notre vie est une ombre vaine
Qui se perd dans l’éternité.
À nos deux coeurs l’amour barbare
Offrait un riant avenir ;
Et la mort, la mort nous sépare…
C’est pour bientôt nous réunir.
Repose en paix, ma Virginie!
Le repos n’est pas fait pour moi.
Hélas! le monde entier, sans toi,
N’a rien qui m’attache à la vie.
Que tu savais rendre touchante
La vertu qui t’embellissait!
Oh! comme elle était attrayante,
Quand ta bouche nous l’inspirait!
Le besoin de la bienfaisance
À ton coeur se faisait sentir ;
Et quand tu peignais l’innocence,
Ton front n’avait point à rougir.
Repose en paix, ma Virginie!
Le repos n’est pas fait pour moi.
Hélas! le monde entier, sans toi,
N’a rien qui m’attache à la vie.
Partout ton image tracée
S’offre à mes tendres souvenirs ;
Ton nom, présent à ma pensée,
S’échappe à travers mes soupirs.
L’horreur de la nuit la plus noire
Seule convient à ma douleur.
Il faudrait perdre la mémoire,
Quand on a perdu le bonheur!
Repose en paix, ma Virginie!
Le repos n’est pas fait pour moi.
Hélas! le monde entier sans toi,
N’a rien qui m’attache à la vie.
Cruel départ! fatal voyage!
La mort t’attendait au retour.
Pourquoi, dans le même naufrage,
Paul n’a-t-il pas perdu le jour!
Ma soeur, ma compagne chérie,
Pouvais-tu vivre loin de moi!
Ô Virginie! Ô Virginie!
Je suis plus à plaindre que toi.
Repose en paix, ma Virginie!
Le repos n’est pas fait pour moi.
Hélas! le monde entier, sans toi,
N’a rien qui m’attache à la vie.
C’est là, sur cet affreux rivage,
Que j’achèverai de mourir ;
L’écho de ce rocher sauvage
Redira mon dernier soupir.
Je veux pleurer toute ma vie
Le jour qui put nous séparer :
Mais console-toi, mon amie ;
Paul n’a plus longtemps à pleurer.
Repose en paix, ma Virginie!
Le repos n’est pas fait pour moi.
Hélas! le monde entier sans toi,
N’a rien qui m’attache à la vie.