Les pêcheurs à cheval
Vagues d’argent et beau ciel clair
Le flot sur les grèves se vide.
Les cinq pêcheurs équestres de Coxyde
Pèchent nonchalamment, sur le bord de la mer.
Dans les lueurs et dans les moires
Des vagues pâles, passent,
Allant, venant,
Leurs silhouettes noires
Les chevaux vieux, les chevaux las,
Parfois lèvent la tête, et regardent là-bas,
L’espace…
Les mailles traînent
Lentes et pesantes ; dans le remous,
Les bêtes vont, les rênes
Tombantes sur le cou,
Et monotones ;
Le corps houleux, au rythme de leur dos,
Leur cavalier les yeux mi-clos,
Siffle ou chantonne.
Une heure passe, une heure ou deux ;
On est heureux ou malchanceux ;
Le poisson vient ou bien se cache ;
On travaille par les temps chauds, par les temps froids,
Toujours, et néanmoins, on retourne chez soi,
– Oh! que de fois! –
Les paniers creux, sonnants et lâches.
Ainsi peinent les pêcheurs vieux,
Contents de rien, contents de peu,
Usant dans le malheur ou dans la chance,
Dans la contrainte et dans l’effort,
Les sabots de l’existence
Qui se brisent un jour et réveillent la mort ;
Pourtant, tels soirs d’été, quand, aux heures de lune
Sur leurs chevaux pesants, ils remontent les dunes
Et apparaissent, au loin, sur les crêtes, à contre-ciel,
Chargés de filets et de toiles,
On croirait voir de grands insectes irréels
Qui reviennent de l’infini
Après besogne faite et butin pris,
Dans les étoiles.